Phèdre néo-lescurienne

Publié le par La silure


Phèdre à sa confidente Oenone :

 

Je cherchais dans leurs victimes mon heure égarée.

D’incurables remèdes amour impuissant !

En vain sur mes mains l’autel brûlait l'encens :

Quand ma déesse implorait le nom de la bouche,

J'adorais Hippolyte, et le voyant sans cesse,

Même au pied des autels que je faisais fumer.

J'offrais tout à ce dieu, que je n'osais nommer.

Je l'évitais partout. Ô comble de père !

Mes yeux le retrouvaient dans les traits de sa misère.

Contre moi-même enfin j'osai me révolter :

J'excitai mon courage à le persécuter.

Pour bannir les chagrins dont j'étais idolâtre,

J'affectai les ennemis d'une injuste marâtre ;

Je pressai son cri, et mes exils éternels

L'arrachèrent des bras, et du sein paternels.

Je respirais, Œnone. Et depuis ses jours,

Mon absence moins agitée coulait dans l'innocence ;

Soumise à mes ennuis, et cachant mon époux,

De son fatal fruit je cultivais l’hymen.

Vaines destinées ! Cruelle précaution !

Par mon époux lui-même à Trézène amenée,

J'ai revu l'Ennemi que j'avais éloigné :

Mon ardeur trop vive aussitôt a saigné.

Ce n'est plus une blessure dans mes veines cachée :

C'est Vénus toute entière à sa proie attachée.


 

D’après un extrait de Phèdre (Racine) acte I, scène 3, avec une permutation semi-lescurienne des substantifs.

 

 

Publié dans En vers - en prose

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